Alexandre Castant

Marie-Jo Lafontaine, 2014

Préface

« Soudain, le ciel devint bleu » in Marie-Jo Lafontaine, Soudain, le ciel devint bleu, introduction & divers textes, Éditions Guy Pieters, Saint-Paul-de-Vence, 2014.

Avec une production qui réunit sur près de quarante ans photographies, vidéos, installations, mais aussi monochromes et peintures, Marie-Jo Lafontaine a constitué, au fil du temps, une œuvre polyphonique qui traverse de nombreux genres et sujets. Ainsi le portrait, le corps, le paysage (urbain) et les fleurs (nature morte) y ont souvent été abordés, représentés, traités et avec eux les thématiques – intimes ou politiques – de l’enfance, la solitude et la mort, de la société à l’ère de la mondialisation, le pouvoir et l’argent. Pour cela, des dispositifs ont également été inventés, dispositifs liés à la création de nouveaux rapports, par exemple entre la photographie et le texte ou entre l’image et le son, ou encore avec la conception de vidéo-sculptures. Or, de cette variété de pratiques, de genres et d’investigations plastiques, l’exposition de la galerie Guy Pieters de Saint-Paul-de-Vence propose, en trois salles et donc en trois parties, sinon une synthèse du moins une introduction précise, dense et raffinée, tout en ouvrant aujourd’hui cette œuvre à de nouvelles préoccupations. La première salle (Wishlist) présente des productions inscrites dans différentes périodes de l’artiste, puis des vidéos réunies sous le titre de l’une d’entre elles sont exposées dans le sous-sol de la galerie (Dark Pool And Others), une réflexion sensible sur le paysage, enfin, qui a pris source dans l’expérience de la lumière de Saint-Paul-de-Vence, mais aussi dans la mémoire qu’a l’artiste de la représentation du ciel dans la peinture de la Renaissance italienne, est montrée dans un troisième espace de la galerie (Soudain, le ciel devint bleu). En effet, dès son arrivée à Saint-Paul-de-Vence, Marie-Jo Lafontaine redécouvre le ravissement de cet arrière-pays méditerranéen, l’éblouissement de sa lumière et l’infini de son horizon, le caractère sublime d’un ciel qui, dit-elle, est « plus haut qu’ailleurs ». Ce faisant, c’est en elle-même, confie l’artiste,
« qu’elle redécouvre dès ce moment des couleurs, des lumières ». Il lui faudra trouver, alors, une forme, une matière, un support qui traduisent cette expérience d’une beauté que son œuvre a recherchée (citons, à titre d’exemple, le titre éloquent de la série de 1988 Savoir retenir et fixer ce qui est sublime…). Marie-Jo Lafontaine a toujours fait des monochromes, souvent en liaison avec ses photographies, des monochromes aux tonalités sombres et vives, et c’est précisément à eux qu’elle pense, aussitôt à Saint-Paul-de-Vence, pour créer des peintures qui font résonner, vibrer dans l’exposition, l’expérience et l’évidence de la lumière.

Extrait du texte de A. C.

<http://www.guypietersgallery.com>